Blog paru sur www.24heures.ch, 11.5.2007

Le tribunal fédéral a finalement tranché : l’exploitation des Carrières d’Arvel détériore gravement le paysage du Chablais sans que l’intérêt de la production de gravier ne le justifie.

 

La saga administrative et judiciaire a duré près de neuf ans avant que justice soit finalement rendue. Les Carrières doivent arrêter leur exploitation et remettre le site en état. On ne peut que féliciter la population locale de s’être ainsi battue pour obtenir enfin que le droit soit respecté. Car on ne peut aussi que blâmer le canton de Vaud d’avoir dans cette affaire fait preuve d’une complaisance suspecte à l’égard de cette exploitation industrielle. La collusion entre le géologue cantonal de l’époque et le bureau à l’origine des études d’impact a été dénoncée par la presse. Les conseillers d’Etat successifs en charge du dossier n’ont pas davantage arbitré le débat dans le sens du droit. Cette affaire après d’autres souligne à quel point la loi est une chose et son application une autre, abandonnée entre les mains d’une administration mal contrôlée par les élus de l’exécutif. Cette désolante constatation mène à une autre réflexion. L’enchevêtrement des institutions suisses atteint un tel niveau de complexité que la gestion saine du pays et de ses ressources naturelles en devient impossible. La Confédération devrait élaborer un plan sectoriel national pour l’approvisionnement en roches dures, mais elle tarde à le faire. Les cantons sont en charge de faire respecter le droit en la matière, mais ils ne le font pas.

 

Sauf à être naïf, on peut parier que les Carrières d’Arvel feront tout ce qui est en leur pouvoir pour retarder ou affaiblir l’application de la décision du Tribunal fédéral. La saga n’est peut-être pas terminée. Pourquoi ? C’est très simple : ces Carrières appartiennent au groupe international Colas/Bouygues. Ce dernier est un expert dans les relations privilégiées avec le pouvoir politique français. Est-ce que ces mœurs d’Outre Jura vont se répandre ici ? Telle est la véritable interrogation.

 

Jacques Neirynck